LA  BLANCHE  BICHE

 

Celles qui vont au bois,

C’est la mère et la fille,

La mère va chantant

Et la fille soupire,

 

Qu’avez-vous à soupirer,

Ma fille Marguerite ?

J’ai grand douleur en moi

Et n’ose vous le dire.

 

Je suis fille le jour

Et la nuit blanche biche

La chasse est après moi

Les barons et les princes…

 

Et c’est mon frère Renaud

Qui est encore le pire

Allez ma mère allez

Bien promptement lui dire

 

Qu’il arrête ses chiens

Jusqu’aux proches matines

« Où sont tes chiens, Renaud,

Et ta chasse gentille ? »

 

« Ils sont dedans le bois

A courre blanche biche »

« Arrête les, Renaud,

Arrête, je t’en prie ! »

 

Trois fois les a cornés

De son cornet de cuivre

A la troisième fois

La blanche biche est prise.

 

 

Mandons le dépouilleur

Qu’il dépouille la biche

Celui qui la dépouille

Dit : « je ne sais que dire :

 

Elle a les cheveux blonds

Et le sein d’une fille »

A tiré son couteau

En quartiers il la mise

 

En on fait un dîner

Aux barons et aux princes

« Nous voici tous ici

Sauf ma sœur Marguerite »

 

« Vous n’avez qu’à manger

Suis la première assise :

Ma tête est dans le plat,

Et mon cœur aux chevilles,

 

Mon sang est répandu,

Par toute la cuisine

Et sur vos noirs charbons

Mes pauvres os y grillent »

 

Celles qui vont au bois

C’est la mère et la fille

La mère va chantant

Et la fille soupire.